Un peu de repos!

Troisième jour dans Big Apple, le jeune homme, toujours aussi solitaire, avait passé la journée de la veille à pousser les meubles de son appartement, histoire de tout regrouper dans une seule et même pièce: l’immense salon. Cela lui éviterai d’avoir à évoluer dans le reste de la grande surface, vivant dans le salon, et n’utilisant en plus que la salle de bains et la cuisine. Une pièce comble meublait la solitude, et il fallait être stupide pour utiliser les cinq chambres mises à sa disposition.
Ses parents n’avaient décidément rien compris.

Assez épuisé par sa journée de la veille, il décida de se rendre à la bibliothèque Nationale, située non loin de son domicile. Vêtu ce jour là d’un jean rapé et d’un tee-shirt noir, on aurait jamais pensé qu’il descendait d’une famille aussi prestigieuse que la sienne.
Il pénétra dans la vaste étendue littéraire, saluant les employés, et chercha le rayon poésies, lecture du meilleur cru dont il se régalait.... Lorsqu’il l’eut trouvé, il se mit à chercher de quoi l’intéresser...

Heidiline était enfouie au fin fond des rayons poésie, elle avait déja passé un long moment dans l'allée des receuils de pièces de théatre.

La jeune femme ne pouvait pas vraiment occuper son domicile ce jour car les déménageurs enfournaient toutes ses affaires dans leur camion et amenaient cela dans son nouveau logement. Ne voulant déranger les moustachus baraqués en pleine action, elle décida de sortir faire un tour à librairie, car la dernière fois qu'elle s'y était rendue elle avait arrété ses recherches sur la rencontre avec une jeune femme, et donc elle allait s'y remettre ce jour. Vétue d'un jean et d'un polo vert clair, un peu comme la couleur des prés au début du printemps, elle sortit de son chez elle qui allait bientot se retrouver dans un tout autre quartier.

Heidiline consultait un ouvrage de taille moyenne, aux pages délicieusement gratifiées d'illustrations qui mettaient en scène les personnages de la poésie, d'un coup de plume vif et précis qui pouvait transporter n'importe quel mordu dans un tout autre monde. Elle était véritablement plongée dans son poéme qui relatait le malheur d'une jeune fille qu'on voulait marier contre sa volonté, cela étant relaté par des rimes croisées à la fois douce et flatteuses pour la la malheureuse, quand des pas si firent entendre dans l'allée, allée qui était déserte ce jour. Heidiline voulut achever sa lecture avanht de relever les yeux la personne qui ne devait pas se tenir bien loin d'elle.

Ethan regardait les ouvrages, lorsqu'il tomba sur un recueil de poèmes: de Rimbaud, le romantique par excellence. Il s'en empara et se mit à le feuilleter: il appréciait particulièrement le coté brillamment cynique de cet auteur français.
Il ne s'était pas rendu compte que quelqu'un était déjà présent dans le rayon, et, c'est quelques minutes plus tard, qu'il leva les yeux pour apercevoir une jeune blonde dont le visage lui était familier. Après une légère recherche dans sa base de donnée intérieure, il comprit: c'était la fille du pont.

Il s’étonna quelque peu de la trouver ici, dans un lieu d’étude, mais, faisant le rapprochement avec les tableaux qu’elle trimballait le jour de leur rencontre, il en déduit qu’elle devait... Apprécier l’art.
Sans doute pour se donner un genre, pensa t-il comme pour effacer les pensées ‘positives’ qu’il avait eues quelques secondes plus tôt.
Il prit son Rimbaud, et passa à coté de la jeune fille pour aller s’asseoir à une des rares tables libres situées non loin de là.

Il était poursuivi. Bon, très bien, elle n'avait pas le choix, étant donné que la plupart des tables d'études étaient prise. D'ailleurs, les gens étaient fort stupides: ils n'avaient pas cours, ou autre chose à faire? Lui avait une raison pour ne pas être à l'école; Il ne pouvait pas y aller tant qu'il n'avait pas un uniforme neuf à sa taille et à ses lettres.

D'ailleurs il se questionnait sur le niveau. On entendait parler de St Jude jusqu'en Angleterre et lui qui avait fait Eton, qui, d'accord, avait un niveau assez élevé, commençait à se demander si oui ou non le niveau se tenait.
Ethan était appuyé nonchalamment contre le dossier de sa chaise, lisant le poème de Rimbaud, les « réparties de Nina », le visage neutre, plongé dans la beauté de l’ouvrage. Il sentait la table remuer légèrement aux aller retours de la blonde, mais n’ayant pas envie de briser le doux silence, retint ses remarques amères, et se concentra sur Rimbaud.

Tels étaient les vers dans lesquels Ethan était à présent plongé lorsque retentit le micro: tous étaient appelés à quitter le navire, à savoir que la bibliothèque allait bientôt fermer ses portes pour ne rouvrir que le lendemain.
Irrité, il jeta un coup d'oeil à sa montre: vingt et une heures à peine, les américains étaient d'immanquables couche-tôt, c'était... Hum pitoyable.
On n'abandonnait pas du Rimbaud sans avoir terminé le poème, et le jeune homme n'en était qu'à sa première strophe.
Il se leva en soupirant, devançant sa voisine la blondinette pour aller se diriger vers les comptoirs ou les attendaient quelques fonctionnaires impatients de retourner dans le foyer familial. Il lui fallait en plus souscrire au paiement réservé aux personnes désirant une carte de bibliothèque.
Il salua la jeune documentaliste, lui tendit le livre et lui demanda:

-'Bonsoir, puis-je m'inscrire? Je viens d'arriver dans la région..."

La jeune femme lui demanda ses noms, prénoms et adresses;

-"Ethan Jones, Bat C, sur la cinquième..."

Répondit il, un peu agacé. La jeune femme lui demanda ensuite de s'acquitter d'un montant d'une vingtaine de dollars. Il ouvrit son sac, mais, bien entendu, avait oublié son porte monnaie... Après un fouille acharnée de ses poches, il fut contraint de dire, sous l'oeil agacé de la bibliothécaire:

-"Hum... Je..."

Le soupir agacé de la bibliothécaire, additionné à ceux des inscrits voulant empruntés leurs livres perturbèrent au plus haut point Ethan qui était assez déçu de ne pouvoir emprunter son livre.
Il allait laisser la place lorsque la jeune fille du pont, au guichet d'à coté, lui tendit sans un mot un billet de vingt dollars, et s'en alla avant même qu'il n'ai pu refuser ni même la remercier.
Il haussa les épaules, assez étonné par l'attitude altruiste de la jeune femme qui ne l'avait rencontré qu'une fois. Mais elle était déjà parti, et le jeune homme, tendant le billet à la bibliothécaire, attendant qu'elle finisse sa carte de nouvel inscrit. Cinq minutes plus tard, il avait enregistré son bouquin, et s’apprêtait à partir; lorsqu’on l’interpella:

- « Vous avez oublié un livre! »

Mais ça n’était pas le sien, sans doute sa bienfaitrice l’avait oublié dans sa course. Cette fille semblait avoir l’habitude de disparaître en coup de vent. Et la pluie n’arrangeait rien...
Il embarqua le livre de la jeune fille, se disant qu’il pourrait toujours lui rendre lorsqu’il la croiserait, et quitta la bibliothèque, enfonçant sa nouvelle carte dans sa poche...

[Sujet fini]